ANTOINE BAUZA

freelance game designer, writer, creative consultant

Des jeux adaptés

Note : cet article a été initialement écrit pour un dossier du site auteursdejeux.com (dossier #04)

Je ne joue quasiment pas aux adaptations de jeux de société sur mon ordinateur. Si je suis seul, j’allume ma console et je me régale sur une grosse production américaine (Uncharted 2) ou sur un jeu plus poétique comme les japonais savent les faire (Ico, Ookami). Je suis l’heureux propriétaire d’un iPhone que j’ai d’abord acheté pour avoir accès à internet lors de mes déplacements et sur lequel je joue modérément et principalement dans le train. Cette modalité me convient très bien, elle permet de jouer à un grand nombre de jeux avec un investissement (temporel et financier) minimum. Parfait pour découvrir des concepts novateurs (iBlast Moki, Geared) ou pour savourer une minute nostalgique (The Secret of Monkey Island spécial edition) !

Le jeu de société, c’est avant tout partager une expérience ludique avec des échanges sociaux concrets (rires, commentaires éclairés, discussions enflammées, moqueries et mesquineries amicales). Impossible de réunir une telle richesse sans se trouver physiquement dans la même pièce. OK. Bon. Ceci étant dit, la technologie nous permet aujourd’hui de nous asseoir à une table virtuelle, avec des joueurs issus des quatre coins du globe, ou de jouer dans le RER en allant au boulot. Ne pas en profiter serait cracher dans la soupe… et j’adore la soupe !

Portage/Adaptation

Cela fait déjà quelques années que des jeux de société sont adaptés sur des plateformes de jeux sur internet (Boite à Jeux, BrettSpielWelt, Vassal), parfaites pour savourer ses jeux préférés depuis sa tour d’ivoire campagnarde ou lors de ses insomnies chroniques. Par ma part, j’ai eu le plaisir de découvrir des adaptations de Ghost Stories et Pocket Rockets sur Vassal. Je ne suis pas à l’origine de ses adaptations mais leur existence est une réelle récompense pour nous autres auteurs et, plus d’un point de vue plus pragmatique, une publicité gracieuse toujours bienvenue. J’aimerais d’ailleurs savoir quelle est la proportion de joueurs qui découvrent aujourd’hui un jeu sur une telle plateforme avant d’en faire l’achat « physique », quelle proportion ne joue uniquement que sur une telle plateforme et quelle proportion combine le jeu physique et le jeu numérique…

En parallèle de ces portages, réalisés par des joueurs pour des joueurs pourrait-on dire, on commence à trouver des adaptations « officielles » des grands succès de nos tables. Bien sûr le Monopoly et le Trivial Poursuit sont les premiers sur cette liste mais les Colons de Catane ne sont pas loin, suivi de près par Les Aventuriers du Rail et Dungeon Twister (Cocorico !). Très logiquement, cette tendance devrait se prononcer en 2010 via les plateformes PC et consoles et sans aucun doute via les téléphones mobiles, supports idéaux à mon humble avis…

Dans cette aventure, il ne faudrait pas oublier les réseaux sociaux, un vecteur majeur dans les activités ludiques sur la toile. L’éditeur Days of Wonder l’a pris en considération et propose aux joueurs d’associer votre compte d’Aventurier du Rail avec votre profil Facebook. Ce phénomène ravive des vieilles réflexions personnelles sur le développement cross-media et renforce ma volonté de ne pas me limiter à la création ludique en boite. Je ne serai pas surpris que certains éditeurs de jeux de société conçoivent leurs projets de la nouvelle décennie sur un double support, physique et numérique. A mon avis, les premiers arrivés seront les premiers servis. A bon entendeur, messieurs les éditeurs…

Inspiration

Le Jeu vidéo comme source d’inspiration dans les jeux de société ? Faites une partie de Space Dealer pour vous en convaincre ! Son auteur, Tobias Stapelfeldt, a certainement pratiqué RTS (Real Time Strategy – jeux de stratégie en temps réel pour les non-spécialistes) car son jeu est une excellente adaptation de ce style de jeu extrêmement plébiscité par les vidéojoueurs. A essayer impérativement… D’autres auteurs puisent dans le vivier vidéoludique et un nom me vient immédiatement en tête : Vladaa Chvatil, auteur, entre autres, de Galaxy Trucker, Space Alert et du récent Dungeon Lords qui rappellera aux aficionados un jeu de Peter Molyneux paru en 1997, Dungeon Keeper. En puisant dans cet univers vidéoludique, Chvatil apporte un souffle de renouveau sur la création ludique, qu’il en soit remercié ! Les années à venir devraient engendrer des auteurs dont l’inspiration se nourrit de l’univers du jeu vidéo, très certainement…

Etant moi-même tombé dans une marmite de jeux vidéo petit, certaines de mes idées de jeux de société ne sont venues d’une expérience digitale, souris ou manette à la main. C’est le cas de Rockband Manager (à paraître en 2010 chez Edge) qui est un hommage à « Rockstar Ate My Hamster » un jeu de mon adolescence , perle de mon défunt Atari 520STE. Et en lorgnant du côté de Ghost Stories et plus précisément de son emblématique Wu-Feng, vous verrez une référence aux bons vieux boss de fin de niveaux des Beat’em All et Shoot’em Up de mon enfance…

Création

Côté création, je me suis intéressé aux jeux vidéo bien avant les jeux de société. C’est d’ailleurs lors d’une formation en jeu vidéo que j’en suis arrivé à découvrir le jeu de société dit « moderne » puis, de fil en aiguille, à concevoir mes propres jeux en boite, faute d’avoir pu me tracer un chemin dans l’industrie du jeu vidéo. Ne pas avoir pu travailler sur des projets digitaux me laisse quelques regrets et je n’ai jamais abandonné l’idée de travailler sur des jeux numériques. Avec le succès de l’iPhone (Apple) et l’évènement Android (Google), le jeu sur téléphone mobile est le média idéal pour tenter de mettre le pied dans la porte vidéoludique. Très logiquement, je m’y intéresse de près. Au moment où j’écris ces lignes, j’ai un projet d’adaptation de l’une de mes « boites » sur iPhone et je développe un jeu pour la plateforme Android. Quoi qu’il soit, les deux médias réclament une approche créative très différentes…et c’est tant mieux car j’aime la diversité !

Pour conclure, je ne ferai qu’un constat évident : le JdS sort de sa boite, qu’on se le dise !

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